Depuis quelques années, la pratique de la discipline architecturale s’est incrémentée de nombreuses contraintes liées aux enjeux environnementaux et climatiques qui caractérisent légitimement notre époque après l’épuisement des ressources et le réchauffement climatique consécutifs de l’ère industrielle.
L’intégration de ces contraintes au processus de projet est aujourd’hui incarnée par une nouvelle ingénierie imposée aux équipes de Maîtrise d’œuvre par les Maîtres d’Ouvrage que ce soit lors de la programmation par l’intermédiaire d’Assistants (A.M.O.), pendant la conception par l’intermédiaire de bureaux d’études spécialisés, ou en aval pour valider des performances thermiques par diverses certifications soi-disant garantes d’une parfaite conception.
Le risque de cette démultiplication de compétences au sein du processus de création architecturale est de donner lieu à des projets dont chacune des parties répondrait de façon isolée à un enjeu de conception, ici lié à la question de notre adaptation thermique au changement climatique, sans que l’ensemble forme un tout cohérent, accueillant et véritablement durable.
Face à cette situation, l’architecte ne doit pas rester passif en acceptant de voir réduire son champ de compétences et en acceptant d’occuper le dernier maillon de la chaine de transformation du cadre de vie. Il doit être en capacité d’interroger ce contexte et de proposer d’autres voies possibles à travers le puissant outil créatif et systémique de critique et de transformation du monde dont il dispose : le projet.
Proposer d’autres voies possibles, c’est savoir regarder en arrière pour remettre au goût du jour des dispositions typologiques et constructives de bon sens qui ont déjà fait thermiquement leur preuve.
C’est aussi interroger le contexte climatique dans lequel nous évoluons, en s’intéressant aux disciplines connexes de l’architecture qui le constituent pour se les (ré)approprier de façon optimiste en les considérant comme un nouveau terreau fertile à l’acte de création du projet, capable de se transformer en solutions inventives.
Enfin, c’est penser l’adaptation de l’architecture aux mutations climatiques par une approche holistique de l’espace comme production sociale, culturelle et sensible.
Texte co-écrit par Jérôme Apack, Delphine Borg et Jean-Luc Fugier dans le cadre de leur enseignement commun de master Ici & Maintenant, le réel comme outil d’invention du projet, automne 2023